Pour mieux comprendre la fin de vie

Acharnement thérapeutique, obstination déraisonnable, aide à mourir, sédation profonde, euthanasie, suicide assisté… Il est difficile de saisir toute la portée du projet de loi, tant les termes employés renvoient à des réalités distinctes. Voici un récapitulatif des principaux concepts.

Lexique

Toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » Article L 1er A de la loi n° 99- 477 du 9 juin 99. L’accompagnement, depuis la loi de 1999, fait partie intégrante de la définition des soins palliatifs, avec une dimension à la fois sociale et médicale.
« Estimer qu’une thérapeutique est un acharnement ou une obstination, c’est considérer qu’un traitement est ou devient inutile, disproportionné, voire néfaste et donc finalement déraisonnable ». CSP, Art. L1110-5-1. Loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie – dite Leonetti : « Les actes de prévention, d’investigation, de traitement et de soins ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu’ils résultent d’une obstination déraisonnable. Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris, conformément à la volonté du patient et, si ce dernier est hors d’état d’exprimer sa volonté, à l’issue d’une procédure collégiale définie par voie réglementaire. La nutrition et l’hydratation artificielles constituent des traitements qui peuvent être arrêtés (…) ».

l’expression désigne tout acte ayant pour finalité de provoquer la mort d’une personne, à sa demande, lorsqu’elle est atteinte d’une maladie grave et incurable, en phase avancée ou terminale. (CNSPFV – Commission d’expertise). (Mots et formulations- Ministère chargé de l’organisation territoriale et des professions de santé) 
L’expression, utilisée par le CCNE dans son avis 139 et reprise par le ministère, associe l’euthanasie et le suicide assisté, deux voies différentes dans leur philosophie, leur déroulement et leurs conséquences éthiques.

Les expressions « Aide à mourir » (projet France 2024), « Aide Active à Mourir » (projet AAM France 2023) ou « Aide Médicale à Mourir » (AMM, au Canada), ont la même signification.

La nutrition et l’hydratation artificielles constituent des traitements qui peuvent être arrêtés lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie. » CSP, Art. L. 1110-5-1. En phase terminale ou agonique, l’arrêt de l’hydratation et de la nutrition artificielle a pour but d’améliorer le confort du malade en évitant l’encombrement terminal. Attention à la confusion fréquente entre alimentation (orale, et qui s’arrête rarement puisque l’alimentation plaisir peut persister même en fin de vie) et nutrition (artificielle, par sonde perfusion, assistance diverses…et dont le maintien peut relever de l’obstination déraisonnable).
« Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. » CSP, Art. L. 1111-4. Le patient a le droit d’accepter ou de refuser toutes les propositions thérapeutiques qui lui sont offertes. Le préalable nécessaire au consentement est une information loyale, claire et appropriée sur l’état de santé, les investigations et les soins qui sont proposés.
Les directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie, concernant les conditions de limitation ou d’arrêt de traitement ainsi que son accord éventuel pour une sédation profonde. Elles sont inscrites dans un document écrit daté et signé déposé dans le dossier médical. » CSP, Art. L. 1111-11. Document modèle de directives anticipées de la HAS. Les directives anticipées sont sans limite de durée et révocables à tout moment. Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Les directives anticipées s’imposent au médecin, sauf en cas d’urgence ou de caractère manifestement inapproprié. Confirmé par Arrêt Conseil constitutionnel novembre 2022
o La douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire ». IASP 1999 La douleur est une sensation complexe qui comporte plusieurs composantes (sensorielle, affective, cognitive, comportementale) en rapport avec une lésion tissulaire. o La souffrance est un « ressenti à plusieurs dimensions, émotionnelle, psychique, affective, spirituelle, existentielle ; elle peut exister en l’absence de toute douleur ». Autrement dit la douleur est d’abord « physique » et la souffrance « morale », les deux étant souvent intriquées. Douleur et souffrance se potentialisent évidemment, mais il est important de différencier la douleur (accessible aux médicaments des lésions physiques) de la souffrance (accessible à la relation et aux psychotropes). « On s’accordera donc pour réserver le terme douleur à des affects ressentis comme localisés dans des organes particuliers du corps ou dans le corps tout entier, et le terme souffrance à des affects ouverts sur la réflexivité, le langage, le rapport à soi, le rapport à autrui et le rapport au sens au questionnement ». Paul Ricoeur Psychiatrie française, n° spécial du colloque de l’ AFP, Juin 1992
« Une douleur est qualifiée de réfractaire lorsqu’aucun des traitements antalgiques faisant l’objet des recommandations de la HAS ne sont efficaces ou utilisables ». Recommandation de bonne pratique « Antalgie des douleurs rebelles et pratiques sédatives chez l’adulte » (HAS). https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2020-02/reco_fin_vie_med.pdf Les 3 critères du syndrome réfractaire sont : gravité avérée éprouvée par des échelles validées ; efficacité insuffisante de tous les traitements mis en œuvre ; délai d’amélioration ou effet secondaire insupportables.
Acte d’un tiers qui met délibérément fin à la vie d’une personne qui le demande, dans l’intention de mettre un terme à une situation jugée insupportable. Comité Consultatif National d’éthique, CCNE, Avis n°63 janvier 2000.
En fin de vie, une procédure de LAT est une décision médicale prise en équipe pour adapter la thérapeutique aux situations complexes, en concertation avec le malade lorsque celui-ci est en état d’exprimer sa volonté. (Mots et formulations- Ministère chargé de l’organisation territoriale et des professions de santé) Il s’agit par exemple d’arrêter une dialyse ou une nutrition artificielle. Une décision de LAT doit être prise obligatoirement en équipe lors d’une procédure collégiale, au vu du contexte médical, au vu des directives anticipées ou, à défaut, du témoignage de la personne de confiance ou, à défaut, de celui des proches.
Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant, qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté. CSP, Art. L. 1111-6. Elle rend compte de la volonté de la personne. Son témoignage prévaut sur tout autre témoignage. Cette désignation est faite par

Réunion d’équipe particulière qui prend la forme d’une concertation avec les membres présents de l’équipe de soins, si elle existe, et de l’avis motivé d’un médecin extérieur appelé en qualité de consultant. CSP, Art. L. 1110-5 et R. 4127-37-2.

La procédure collégiale est obligatoire dans trois situations :  décisions de limitation/ arrêt de traitement (LAT) ; demande de sédation profonde et continue ou de ne pas suivre les directives anticipées d’un malade quand elles sont inappropriées.

 Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement. » CSP, Art. L. 1111-4.

 

Il ne faut pas confondre soins et traitements.

Tous les traitements peuvent être arrêtés au nom de la demande du malade ou de l’interdiction de l’obstination déraisonnable. L’équipe de soins est tenue d’informer de façon claire et intelligible le patient des conséquences de ce refus (article R. 4127-36 du CSP). Après un délai de réflexion raisonnable, le professionnel redemandera au patient de reformuler sa décision de manière à s’assurer de sa stabilité. La décision du patient doit être consignée au dossier médical.

Même si une limitation de traitement a été actée, les soins ne s’arrêtent jamais, puisqu’il s’agit de relation, d’hygiène, de prise en compte de la personne humaine et de sa dignité : « le prendre soin ».

La sédation est la recherche, par des moyens médicamenteux, d’une diminution de la vigilance pouvant aller jusqu’à la perte de conscience. Son but est de diminuer ou de faire disparaître la perception d’une situation vécue comme insupportable par le patient, alors que tous les moyens disponibles et adaptés à cette situation ont pu lui être proposés et/ou mis en œuvre sans permettre le soulagement escompté. La sédation peut être appliquée de façon intermittente, transitoire ou continue suivant le contexte et le but poursuivi. Il existe plusieurs types de sédation : Sédation proportionnée / transitoire/ profonde. SFAP 2009. HAS / Les Parcours de Soins – Février 2018 https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2018-03/app_164_rapport_biblio_pds_sedation_vf.pdf
La SPCMJD est une thérapeutique, utilisée uniquement en phase terminale, pour soulager les symptômes réfractaires, mise en œuvre après une procédure collégiale obligatoire. https://sante.gouv.fr/soins-et-maladies/prises-en-charge-specialisees/les-soins-palliatifs-et-la-fin-de-vie/droit-d-acces-aux-soins-d-accompagnement-rappel-du-cadre-legislatif/article/mieux-repondre-au-droit-de-mourir-dans-la-dignite-avec-la-loi-claeys-leonetti C’est le seul type de sédation qui relève de la Loi Claeys Leonetti de 2016. L’intention de la SPCMJD est le soulagement. Elle peut être mise en œuvre dans deux situations prévues par l’article L. 1110-5-2 du CSP : o lorsque le patient, atteint d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme, présente une souffrance réfractaire aux traitements. o lorsque la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable. Il ne faut pas confondre cette sédation profonde et continue lors de la phase terminale avec une sédation partielle et/ou transitoire instaurée pour répondre à différents symptômes et complications au cours de la maladie et pas forcément en fin de vie (celle-ci relevant du traitement normal des symptômes, recommandés par les bonnes pratiques palliatives). https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2020-02/reco_fin_vie_med.pd
En médecine, ensemble des mesures et actes visant à faire bénéficier une personne des moyens de diagnostic et de traitement lui permettant de maintenir et/ou d’améliorer sa santé physique et mentale ». Dictionnaire médical de l’Académie de Médecine – version 2024. « Acte de soins : un acte de soins est un ensemble cohérent d’actions et de pratiques mises en œuvre pour participer au rétablissement ou à l’entretien de la santé d’une personne. Un acte de soins se décompose en tâches définie et limitées, qui peuvent être indépendantes dans leur réalisation. Dans un même acte de soin, certaines tâches peuvent être réalisées par des professionnels de santé différents ». Haute Autorité de Santé (HAS), 2007 – Vocabulaire de base coopération entre professionnels de santé, https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2010-09/vocabulaire_coop_01092010_2010-09-03_14-05-56_834.pdf, https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/cooperation_pros_rapport_aspects_juridiques.pdf

Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage. » CSP, Art. L1110-10. 

 

« Les soins palliatifs sont une approche pour améliorer la qualité de vie des patients (adultes et enfants) et de leur famille, confrontés aux problèmes liés à des maladies potentiellement mortelles. Ils préviennent et soulagent les souffrances grâce à la reconnaissance précoce, l’évaluation correcte et le traitement de la douleur et des autres problèmes, qu’ils soient d’ordre physique, psychosocial ou spirituel. » OMS (World Health Organization) – https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/palliative-care

 

 « Toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » Article 1a de la Loi no 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs.

 

Ils peuvent intervenir très tôt dans l’évolution d’une maladie grave, s’attachant à soulager la douleur et les symptômes et à prendre en compte la souffrance sous toutes ses formes. Le consensus international leur donne une acception très large, voir plus bas. 

Se dit d’un traitement qui vise à guérir une maladie. https://www.e-cancer.fr/Dictionnaire/C/curatif Curatif se différencie de palliatif, qui sous-entend que l’on a accepté que la maladie ne pouvait plus guérir. Les deux types de soin peuvent cependant coexister, notamment au début d’une maladie grave : c’est tout l’enjeu des soins palliatifs précoces qui optimisent le confort, la communication et la prise en charge globale.
Expression utilisée pour désigner le fait de prodiguer à une personne qui le demande l’environnement et les moyens pharmacologiques nécessaires pour qu’elle mette fin à sa vie. CNSPFV, Panorama des législations sur l’aide active à mourir dans le monde, 2022 La personne qui le demande s’auto-administre la substance létale.